LE DICTIONNAIRE DU SPECTACLE:
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"Le Grand George"
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D'un seul mot, exprimer une idée précise, concise et pertinente dans le contexte...
Exploiter la rareté des mots, notamment dans les vers courts aux rimes pourtant riches, les figures de styles, faire naître les images...
Maîtriser la musicalité de la langue comme dans la rime ou l'allitération...
Quelques signes de la grande érudition d'un Maître Poète.
Toute cette richesse des textes a parfois fait dire aux amis de Georges Brassens : "Mais n'est-ce pas trop compliqué, toutes
ces références ?".
Brassens répondait : "Les gens iront voir dans le dictionnaire !"
Eh bien voici donc "Le grand Georges", dictionnaire non exhaustif mais comportant quelques explications de textes, quelques clefs utiles, pour ouvrir quelques tiroirs cachés, recelant quelques pépites...
Un exemple ? Voici :
"Le grand chêne" :
Il vivait en dehors des chemins forestiers
Ce n'était nullement un arbre de métier
Il n'avait jamais vu l'ombre d'un bûcheron
Ce grand chêne fier sur son tronc
Il eut connu des jours filés d'or et de soie
Sans ses proches voisins les pires gens qui soient
Des roseaux mal pensant, pas même des bambous
S'amusant à le mettre à bout
Il y a là un clin d'oeil à Jean de La Fontaine et à sa fable "Le chêne et le roseau", bien sûr. Brassens y fait d'ailleurs clairement allusion dans les vers suivants.
Des roseaux, donc, mais pourquoi "mal pensant". On pourrait se contenter de comprendre qu'ils pensent à mal, ces fâcheux voisins, mais...
Voici ce qu'écrit Blaise Pascal dans ses "Pensées"
"L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature; mais c'est un roseau pensant. Il ne faut pas que l'univers entier s'arme pour l'écraser : une vapeur, une goutte d'eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, puisqu'il sait qu'il meurt, et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C'est de là qu'il faut nous relever et non de l'espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale."
Travaillons donc à bien penser...
Les vers :
La poésie s'écrit en vers qui comportent un certain nombre de pieds, qu'on peut assimiler aux syllabes :
Non ce n'é-tait pas le ra-deau 8 pieds
De la mé-du-se ce ba-teau 8 pieds
J'a-vais l'plu-bel a-man-dier 7 pieds
Du quar-tier 3 pieds
A-vant de chan-ter 5 pieds
Ma vie de fair' des 5 pieds
Ha-ran-gues 3 pieds
Ya tout à l'heur' 4 pieds
Quinz' ans d'ma-lheur 4 pieds
Mon vieux Lé-on 4 pieds
La pe-ti-te 4 pieds
Mar-gue-ri-te 4 pieds
Est tom-bée 3 pieds
Sin-gu-liè-re 4 pieds
Du bré-viai-re 4 pieds
De l'a-bbé 3 pieds
La ca-ne 3 pieds
De Jea-nne 3 pieds
Est mort' au gui l'an neuf 6 pieds
Ell' a-vait fait la vei-lle 7 pieds
Mer-vei-lle 3 pieds
Un oeuf 2 pieds
La rime :
La rime est constituée des phonèmes, des sons, identiques ou ressemblants qui se répètent à la fin de deux vers.
En notre tour de Babel
Laquelle est la plus belle
On a ici une rime composée de trois sons : "b", "è", "l".
Quand un seul son rime, cette rime est dite pauvre. Quand deux sons riment, cette rime est dite suffisante. A partir de trois sons, la rime est dite riche.
Elle doit tout à la fois satisfaire l’œil, l’oreille et l’esprit :
Certaines rimes seront acceptées si elles présentent une consonne d’appui équivalente. Ces consonnes d’appui équivalentes sont :
B et P (tombé avec râpé),
D et T (scindé avec tenté),
F et V (effet avec revêt),
J et CH (jais avec penché),
le son K et G (bancal et égal),
N et GN (puîné avec désigné),
X - S et Z (mixé avec rasé et Azay).
La rime « milliardaire » est un jeu de l’esprit utilisé dans les vers holorimes (olorimes) ou pantorimes. Ce type de rimes utilise aussi le calembour :
"Par les bois du Djinn où s’entasse de l’effroi.
Parle et bois du gin ou cent tasses de lait froid."
Alphonse Allais
"Dans ces meubles laqués, rideaux et dais moroses,
Danse, aime, bleu laquais, ris d’oser des mots roses."
Charles Cros
"Gal, amant de la reine, alla, tour magnanime
Galamment de l'arène à la tour Magne, à Nîmes"
Victor Hugo
http://www.etudes-litteraires.com/versification-2.php#forme_fixe
L'allitération :
Figure de style qui consiste en la répétition d'une ou plusieurs consonnes, souvent à l'attaque des syllabes accentuées, à l'intérieur d'un même vers ou d'une même phrase. Elle vise un effet essentiellement rythmique, mais permet aussi de redoubler, sur le plan phonique, ce que le signifié représente. Elle permet de lier phoniquement et sémantiquement des qualités ou caractéristiques tenant du propos afin d'en renforcer la teneur ou la portée sur l'interlocuteur. L'allitération a une forte fonction d'harmonie imitative ; en ce sens elle peut être considérée comme un type d'onomatopée. L'allitération est couramment utilisée en poésie :
"Que ces messes
Basses cessent"
(La marguerite)
Gare au gorille (grr grr grr)
"Bien sûr si l'on ne se fonde
Que sur ce qui saute aux yeux"
(Le vent)
Un bijou
Les chansons de Brassens recèlent de nombreux trésors de rimes, d'allitérations, de références littéraires, philosophiques, etc...A titre d'exemple, voici : "La marguerite". Cette poésie ne comporte que des vers à très peu de pieds : 4-4-3. Et pourtant les rimes sont riches, les images sont belles, les mots sont percutants, les allitérations soulignent le texte...Pour réaliser ce bijou, il fallait être un orfèvre...
C'est l'histoire d'une marguerite...Vous savez, la marguerite...Le symbole de l'amour...: Je t'aime, un peu, beaucoup...
Eh bien voici que cette marguerite tombe inopinément du livre de messe d'un curé !
Mais que faisait donc là cette marguerite...!?!
Penserez-vous, vous aussi, qu'il y a...anguille sous roche...?
Voici l'histoire de la petite marguerite :
La petite
Marguerite
Est tombée
Singulière
Du bréviaire
De l'abbé
Trois pétales
De scandale
Sur l'autel
Indiscrète
Pâquerette
D'où vient-elle
Dans l'enceinte
Sacro sainte
Quel émoi
Quelle affaire
Oui ma chère
Croyez moi
La frivole
Fleur qui vole
Arrive en
Contrebande
Des plates bandes
Du couvent
Notre Père
Qui j'espère
Etes aux cieux
N'ayez cure
Des murmures
Malicieux
La légère
Fleur peuchère
Ne vient pas
De nonettes
De cornettes
En sabbat
Sachez diantre
Qu'un jour entre
Deux avés
Sur la pierre
D'un calvaire
Il l'a trouvée
Et l'a mise
Chose admise
Par le ciel
Sans ambages
Dans les pages
Du missel
Que ces messes
Basses cessent
Je vous prie
Non le prêtre
N'est pas traitre
A Marie
Que personne
Ne soupçonne
Plus jamais
La petite
Marguerite
Ah çà, mais !